Les prix Molson du Conseil des arts du Canada 2018
Tous les ans, deux prix assortis d’une bourse de 50 000 $ chacun sont décernés à d’éminents Canadiens, un dans les arts et l’autre dans les sciences sociales et humaines. Les prix Molson du Conseil des arts du Canada, qui sont financés grâce aux revenus d’une dotation de 1 million de dollars accordée au Conseil des arts par la Fondation Molson, encouragent leurs gagnants à continuer de contribuer au patrimoine culturel et intellectuel du Canada. Le Conseil des arts administre les prix en collaboration avec le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) du Canada.
Diane Schoemperlen
L’écrivaine Diane Schoemperlen est l’auteure de 14 romans, recueils de nouvelles et essais, dont This Is Not My Life: A Memoir of Love, Prison, and Other Complications, sélectionné pour le prix Taylor RBC 2017.
Son recueil Forms of Devotion: Stories and Pictures a été récompensé en 1998 par le Prix littéraire du Gouverneur général dans la catégorie Romans et nouvelles en langue anglaise. Elle est, par ailleurs, lauréate de deux prix du Writers’ Trust of Canada : le prix Marian Engel en 2007 et, en 2017, le Matt Cohen Award: In Celebration of a Writing Life. Elle travaille actuellement sur un projet d’écriture intitulé Create More Worry Less, illustré avec ses propres collages colorés. Diane Schoemperlen, qui est née et a grandi à Thunder Bay (Ontario), vit à Kingston depuis plus de 30 ans.
Pouvez-vous parler d’un risque que vous avez pris? Est-ce que cela a été payant?
De manière générale, faire carrière dans les arts constitue un immense risque en soi. Mes livres sont souvent qualifiés d’expérimentaux et de novateurs, et cela aussi, c’est une entreprise risquée. Le plus grand risque que j’aie pris, sans doute, a été de décider d’illustrer mes livres avec des collages. Cela été payant, puisque le premier de ces livres illustrés, Forms of Devotion, a remporté le Prix du Gouverneur général dans la catégorie Romans et nouvelles en 1998. Remporter ce prix a renforcé ma volonté de continuer d’écrire des livres qui ne correspondent pas forcément à un modèle classique.
Ne bridez pas votre créativité. N’essayez pas d’écrire comme quelqu’un d’autre. N’oubliez pas que vous avez une histoire unique à raconter et que vous êtes la seule personne qui puisse le faire.
À ce stade de votre carrière, qu’avez-vous appris d’essentiel sur votre profession que vous aimeriez partager?
J’ai appris tellement de choses au fil des ans, notamment qu’il faut du courage pour consacrer sa vie à l’écriture. L’important, c’est de continuer d’avancer malgré les difficultés qui ne manquent pas de se présenter. Les choses ne deviennent pas plus faciles, mais on devient plus fort. Ne bridez pas votre créativité. N’essayez pas d’écrire comme quelqu’un d’autre. N’oubliez pas que vous avez une histoire unique à raconter et que vous êtes la seule personne qui puisse le faire.
Lynne Viola
Lynne Viola est née à Nutley, dans le New Jersey (États-Unis), et est diplômée du Barnard College (1978). Elle est titulaire d’une maîtrise et d’un doctorat en histoire de la Russie obtenus à l’Université Princeton, en 1980 et 1984, respectivement.
En 1988, elle a été nommée professeure adjointe en histoire à l’Université de Toronto; en 1989, elle a été titularisée et promue au poste de professeure agrégée et, en 1996, elle est devenue professeure titulaire. En 2011, elle a été nommée professeure d’université et, en 2014, elle a été intronisée membre de la Société royale du Canada. Elle a reçu des subventions importantes du CRSH, de la Fondation John Simon Guggenheim, et elle a obtenu une bourse de recherche Killam du Conseil des arts du Canada. Elle travaille sur l’histoire politique et sociale sous Staline et se concentre plus particulièrement sur la répression massive des années 1930.
Pouvez-vous parler d’un risque que vous avez pris? Est-ce que cela a été payant?
Je suis quelqu’un de prudent en général. J’évite donc les risques autant que possible. Mes déplacements en Russie pour faire de la recherche sont peut-être une exception à la règle.
En 2000, j’ai pris un vol de Moscou à Arkhangelsk à bord duquel on nous a parlé d’une « corde d’urgence » et d’un « tapis de secours » (auquel devait s’accrocher la première personne à sortir). La même année, je me suis rendue dans les îles Solovetsky à bord d’un avion à helices dont le compartiment à bagages se résumait au siège à côté du mien. Travailler dans différentes archives provinciales dans le nord de la Russie représentait, je suppose, un risque en soi, puisque je n’étais jamais très sûre qu’on m’autoriserait à travailler dans certaines d’entre elles ou pas.
J’ai appris que les sciences humaines sont essentielles pour soutenir les institutions démocratiques.
À ce stade de votre carrière, qu’avez-vous appris d’essentiel sur votre profession que vous aimeriez partager?
J’ai appris que les sciences humaines sont essentielles pour soutenir les institutions démocratiques. Notre but, dans l’enseignement des sciences humaines, est de former des personnes à l’esprit critique qui deviendront des citoyens à l’esprit critique. Dans notre empressement à satisfaire les politiciens, nous avons fait pencher la balance trop en faveur des disciplines des STIM (science, technologie, ingénierie et mathématiques), en négligeant non seulement les sciences humaines et sociales, mais aussi les façons dont elles peuvent, en fait, renforcer les STIM. D’une certaine manière, la « corporatisation » du milieu universitaire repose sur une ignorance profonde de l’importance des sciences humaines dans le monde réel. C’est, en réalité, sur des disciplines qui sont considérées comme « peu pratiques » que repose notre démocratie. En affaiblissant les sciences humaines dans l’enseignement public, on ouvre une brèche aux gouvernements « populistes » qui comptent sur une population peu instruite et peu critique.