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Des histoires modelées dans l’argile : l’odyssée artistique de Nancy Oakley
Soutenue par le programme Créer, connaître et partager
Au cœur d’Eskasoni, où les murmures des ancêtres se mêlent au chant du vent, Nancy Oakley sculpte ses histoires dans l’argile. Ses mains, imprégnées de tradition et d’amour, façonnent des vaisseaux qui transcendent l’art – ce sont des parties de son âme, des évocations de son héritage et des voix du passé.
L’héritage mi’kmaq et wampanoag de Nancy Oakley ne fait pas qu’influencer son art, il en est l’essence. L’artiste efface les frontières entre sa personne, son art et sa culture au profit d’une seule identité.
« J’ai du mal à séparer mon identité, mon art et ma culture parce que chacun de ces éléments fait partie de ce que je suis »
− Nancy Oakley
Immergées dans les coutumes des pow-wow, des cérémonies et de l’art traditionnel, ses créations tissent une toile vivante de ses expériences culturelles. Ourdissant les mythes et histoires dans l’art, Nancy multiplie les manières d’imprégner ses créations de récits et de leçons.
Une forme d’art des plus intime
Nancy commence son parcours un appareil photo à la main, à l’Institute of American Indian Arts (IAIA); elle se spécialise alors en photographie. Durant son dernier semestre, elle s’inscrit à un cours de poterie traditionnelle, où elle apprend cet art ainsi que la cuisson traditionnelle sur le feu. C’est une expérience transformatrice. Toutefois, après avoir obtenu son diplôme et être rentrée dans l’est à Eskasoni, elle voit s’évaporer sa passion pour la photographie lorsque son appareil se brise, juste au moment où le numérique gagne du terrain; elle se désintéresse de cette discipline qu’elle adorait pour ses procédés en chambre noire.
À Eskasoni, Nancy commence à travailler au magasin de paniers de son oncle et de sa tante, où elle renoue avec l’amour du tressage en frêne noir d’Amérique et du perlage, savoir-faire appris de sa mère alors qu’elle était enfant. Plus tard, à la Nova Scotia School of Art, elle explore différentes formes d’art, comme la céramique, la fabrication de bijoux, la photographie et le tissage. Même si ses obligations de mère la poussent à interrompre ses études au cours de sa deuxième année, sa passion pour la poterie continue de fleurir. Inspirée par son enfance et son désir d’imprégner son art d’éléments de sa culture, elle commence à intégrer à ses céramiques des influences de ses autres activités artistiques. Nancy commence à tailler des pots avec du foin d’odeur, comme on le fait dans le tressage de paniers, et à y ajouter des prières hiéroglyphiques. Au fil des ans et du mélange des influences, sa poterie évoluera vers une forme d’art unique et profondément personnelle.
La langue des éléments de la nature
Des années plus tard, Nancy découvre de l’argile dans sa cour arrière, ce qui ravive son amour pour la poterie après un temps mort. Guidée par YouTube et sous l’aile d’artistes de l’argile autochtones comme Richard Zane Smith, Nancy commence à perfectionner son art et à récolter sa propre argile. Une œuvre remarquable pour le centre de soins Kiknu d’Eskasoni créée à partir d’argile trouvé sur le site de l’immeuble témoigne de sa nouvelle pratique. Elle symbolise le pont entre passé et présent et un lien concret avec le territoire et ses histoires.
Dans la poterie de Nancy, les éléments de la nature parlent leur propre langue. Des branches de sapin, utilisées pour l’enfumage, laissent des traces noires et mystérieuses sur l’argile. Des algues ramassées sur le rivage confèrent au matériau de délicates teintes de rose. Avec ses enfants, Nancy ramasse des coquilles de moules pour gâcher l’argile, mais aussi du foin d’odeur, veillant à transmettre les traditions à la prochaine génération.
En intégrant parfois des mythes et des récits dans ses œuvres, Nancy confère à son art une riche histoire mythologique. Dans Sacrifice (06nitapesk), Nancy plonge dans les récits d’inondation à l’origine de la création de l’île de la Tortue, récits d’une époque où les animaux nageaient dans les eaux de crue, plongeant dans les profondeurs à la recherche désespérée d’un morceau de terre. Bon nombre échouèrent, mais en fin de compte, un rat musqué émergea avec une parcelle de terre qu’il plaça sur le dos de la tortue, créant l’île de la Tortue. C’est l’éternelle histoire de la création d’un nouveau monde qui est gravée dans l’œuvre, illustrant du même coup le grand thème du sacrifice maternel.
La maternité au cœur de l’œuvre
C’est la maternité qui donne vie à l’art de Nancy. Ses enfants, qui se faufilent dans chaque processus de création et dans chaque œuvre, sont une partie aussi intégrante de son art que l’argile elle-même. Sa famille parcourt les expositions et les pow-wow dans tout le Canada, aidant Nancy à trouver l’inspiration et à vendre ses œuvres en plus de participer à leur création.
« Nous sommes allés dans des pow-wow, explique Nancy. Ils ont appris les danses traditionnelles, la façon de récolter le foin d’odeur, le perlage, la poterie, le jardinage, la technique de récolte de la sève de l’érable. Nous avons même fait bouillir l’eau d’érable dans l’un de mes pots de cuisson traditionnels pour en faire du sirop. »
De leur mère, les enfants ont appris l’artisanat traditionnel, l’art de l’autosuffisance et la beauté de leur héritage. « J’espère leur avoir enseigné l’autosuffisance, l’amour de soi et de sa famille et l’importance de ne pas avoir peur de poursuivre ses rêves », dit-elle avec fierté. Les traditions qu’elle a inculquées à ses enfants continuent de fleurir; témoignage vivant de son dévouement et de son amour.
La poterie de Nancy Oakley est plus que de l’art – c’est un récit vivant, un amalgame de terre, d’esprit, de traditions et d’innovation. Dans les mains de l’artiste, les histoires des ancêtres prennent forme, leurs voix résonnant dans l’argile et inspirant les générations à venir.