Les gagnants des prix Molson et de la bourse John-G.-Diefenbaker de 2019
Prix Molson 2019
Chaque année, deux prix de 50 000 $ chacun sont accordés à des Canadiens qui se sont distingués, l’un dans les arts et l’autre en sciences sociales ou humaines. Financés par une dotation d’un million de dollars faite au Conseil des arts par la Fondation de la famille Molson, les prix Molson encouragent les Canadiens honorés par cette distinction à continuer de contribuer au patrimoine culturel et intellectuel du Canada. Le Conseil des arts du Canada administre les prix en collaboration avec le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH).
Alexina Louie
Alexina Louie est l’une des compositrices contemporaines les plus estimées au Canada. Ses explorations de l’art et de la philosophie asiatiques, de même que son désir d’expression de soi, ont contribué à la formation de son identité musicale unique. De nombreuses organisations, comme le Ballet national du Canada, la Compagnie d’opéra canadienne, l’Orchestre symphonique de Montréal, le Toronto Symphony Orchestra et l’Orchestre du Centre national des Arts, lui ont commandé des œuvres de tous genres musicaux – dont le ballet et l’opéra –, qui ont été interprétées et diffusées à l’étranger. Alexina Louie a remporté le prix Juno de la composition classique à deux reprises, le prix des compositeurs du Centre national des arts, le prix Jules-Léger (musique de chambre), le prix Chalmers (composition musicale) et le prix Louis-Applebaum, qui souligne l’excellence en composition de musique de film. En 2002, elle a été nommée officière de l’Ordre du Canada.
Quelles sont vos sources d’inspiration?
Pour moi, la composition est un acte d’expression de soi, un moyen de communication. Ma musique est le fruit de mes expériences artistiques, culturelles et musicales hétéroclites – jouer de la musique pendant des cinq à sept dans les hôtels de Vancouver, enseigner le piano, regarder des films de samouraïs japonais ou suivre chaque année en famille la danse du lion, avec ses tambours, ses gongs et ses pétards, lors du Nouvel An chinois.
Considérant votre carrière, qu’est-ce qui vous apporte le plus de fierté?
L’importance et la riche diversité de mon répertoire de compositions. Il contient des pièces pédagogiques pour piano destinées aux enfants, un opéra complet pour la grande scène et des opéras comiques « révolutionnaires » de cinq minutes pour la télévision (créés en collaboration avec le réalisateur Larry Weinstein et le librettiste Dan Redican), mais aussi des compositions avant-gardistes moins conventionnelles.
De quelle œuvre d’un autre artiste auriez-vous aimé être l’auteure? Pourquoi?
La finesse et le génie artistique de la sculpture Apollon et Daphné, de Bernini, m’inspirent vraiment. Cet artiste a su représenter l’instant même où Daphné se transforme en laurier. Le plus impressionnant, c’est le mouvement qu’il a insufflé au matériau. Contempler ce genre de sculpture est pour moi une expérience époustouflante.
John Borrows
John Borrows, B.A., M.A., J.D., LL.M., Ph. D., LL.D. et MSRC, est professeur à l’école de droit de l’Université de Victoria, en Colombie-Britannique, et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur le droit autochtone. Ses publications comprennent Recovering Canada: The Resurgence of Indigenous Law (prix Donald-Smiley 2002 du meilleur ouvrage en sciences politiques canadiennes), Canada's Indigenous Constitution (prix du meilleur ouvrage sociojuridique canadien en 2011), Drawing Out Law: A Spirit’s Guide (2010) et Freedom and Indigenous Constitutionalism (prix Donald-Smiley 2016 du meilleur ouvrage en sciences politiques canadiennes), tous aux Presses de l’Université de Toronto. Gagnant du prix Killam de 2017 en sciences sociales, M. Borrows est Anichinabé/Ojibwé et membre de la Chippewa of the Nawash First Nation de l’Ontario, au Canada.
Quelles grandes leçons apprises dans votre carrière aimeriez-vous transmettre aux autres?
Les nuances sont sacrées et il faut se méfier des cas isolés. On a fait preuve d’une grande générosité à mon égard pendant mon apprentissage du droit autochtone et de sa relation à la vie. Les aînés et les autres enseignants m’ont montré qu’il faut de la subtilité, de la retenue et du doigté pour travailler et enseigner dans ce champ, et pour écrire à son sujet. C’est pourquoi je reste prudent avec les généralisations abusives et les opinions péremptoires.
Quelle est la réalisation dont vous êtes le plus fier?
Je suis ravi que l’Université de Victoria offre désormais un cursus en droit autochtone (J.I.D.) dans le cadre d’un programme conjoint en droit (J.D.) à notre faculté. J’ai commencé à travailler sur cette idée en 1995, avec Harold Cardinal, Trish Monture et Sakej Henderson.
Parlez-nous d’un risque que vous avez pris et qui s’est avéré fructueux.
J’ai enseigné le droit anishinaabe à des étudiants sur ma réserve, en me fondant sur la connaissance du territoire, et c’était une première. Les étudiants ont vécu une expérience d’apprentissage directement sur le terrain, sous ma supervision, et avec l’apport des aînés, des chefs de bande, des membres de la communauté et d’autres intervenants. Ils ont alors vu que nos lois émanent des rochers, des plantes, des insectes, des oiseaux, des animaux, des vents, de l’eau et du ciel, et qu’elles sont inscrites dans notre langue, nos chansons, nos histoires, nos enseignements et nos pratiques.
Bourse John-G.-Diefenbaker 2019
La bourse John-G.-Diefenbaker permet à un éminent chercheur allemand en sciences sociales ou en sciences humaines de réaliser des travaux de recherche au Canada et de faire de brefs séjours dans des institutions américaines pour enrichir son expérience. Elle vise à encourager les échanges entre les communautés universitaires du Canada et de l'Allemagne.
Christoph Brunner
Professeur à l’Université Leuphana, en Allemagne, Christoph Brunner fera une résidence d’un an à l’Université McGill, où il réalisera un projet de recherche spécialisé, donnera des cours, des conférences et des ateliers, et échangera avec des membres de communautés de chercheurs canadiens et américains.
Les recherches de M. Brunner portent sur les liens entre les médias, les affects et les politiques relatives aux enjeux esthétiques. Elles ciblent particulièrement les mouvements sociaux contemporains et leur utilisation des techniques et des stratégies esthétiques. À titre de professeur invité au département d’anglais de l’Université McGill, il collaborera avec Alanna Thain au Moving Image Research Lab et donnera des conférences à The New School (New York) et à l’Université d’art et de design Emily-Carr (Vancouver). Il travaillera également à la rédaction d’une monographie intitulée Activist Sense: Towards a Political Aesthetics of Experience.
Quelles grandes leçons apprises dans votre carrière aimeriez-vous transmettre aux autres?
En tant qu’universitaire et chercheur, je dirais que les rencontres personnelles ont une influence sur mes pratiques. Il peut s’agir d’une conversation, d’une expérience ou d’une situation qui modifient la manière dont on pense ou on agit, qui entraîne un mouvement qui nous pousse à agir et à faire quelque chose. Dans un domaine qui regorge de possibilités, pour susciter ce genre de rencontres, il faut un certain savoir-faire, une intention particulière. En ce sens, je crois qu’il est important de chercher ou d’ouvrir les espaces où elles peuvent se manifester.
Parlez-nous d’un risque que vous avez pris et qui s’est avéré fructueux.
De mon point de vue privilégié, je peux dire que l’un des risques que j’ai pris et qui a enrichi ma vie comme être humain, c’est de vivre dans divers endroits, en Europe et en Amérique du Nord, où j’ai pu me frotter à des gens, des cultures et des façons de faire et de penser qui m’ont profondément changé. Cela peut paraître modeste en comparaison de ce qu’osent faire beaucoup d’autres personnes, mais quand je suis venu à Montréal pour faire mon doctorat, c’était la première fois que j’y mettais les pieds – sans vraiment parler le français – et ç’a été un tournant décisif dans ma vie personnelle et professionnelle.