Identités façonnées
23 janvier 2018 au 3 juin 2018
À propos d'identités façonnées
Persimmon Blackbridge se sert d'un mélange de bois sculpté et d'objets trouvés pour s'interroger sur la façon dont le handicap est présenté comme une fracture dans notre mode de vie ordinaire, et non comme un élément qui en fait normalement partie. Son exploration de chaque figurine commence par le handicap, mais se complique nécessairement lorsque nos identités incarnées se recoupent et se chevauchent.
Voici des extraits de la déclaration de Persimmon Blackbridge :
« Cette œuvre est composée de fragments de sens qui se chevauchent en même temps : le handicap, le regard de la “lesbienne féminine”, les amis décédés, le racisme, la pluie sans fin, autant de choses qui agissent sur nous en même temps dans nos vies quotidiennes. Ces sens superposés se reflètent dans les expressions qui couvrent les bords des panneaux, qui ne définissent pas une seule pièce ou un groupement, mais lancent des questions, font naître d’autres interprétations de la série entière. »
« Ces figurines sont bizarres et composées de morceaux brisés. Ce n’est pas que nous (les gens, étranges et ordinaires dont le corps défie la défaillance) soyons brisés, mais que nous sommes humains. Et la condition humaine est bizarre, contradictoire, composée d’éléments disparates. Les figurines expriment aussi le pouvoir et la beauté, non parce que nous transcendons notre douleur, ou que nous nous sommes définitivement libérés, mais parce que nous possédons la force, la grâce et l’émerveillement, indissociables de notre chagrin, notre confusion et notre colère. »
Tangled Art + Disability souhaite reconnaître les débats valables qui ont eu lieu avec certains membres des groupes anglophone et francophone de personnes handicapées. Aux fins de l’exposition Identités façonnées tenue en 2018 dans l’espace Âjagemô, le mot anglais « disability » sera traduit par « handicapé » dans les textes français. En tant qu'organisation favorisant la participation des personnes qui s’auto-identifient comme handicapées, sourdes ou vivant avec une maladie mentale, nous cherchons à poursuivre la conversation évolutive et nécessaire au sein de ces communautés sur la façon dont nous nous identifions et sommes identifiés au sein d'un pays bilingue. Nous vous invitons à faire parvenir un courriel à Tangled Art + Disability pour faire part de tout commentaire ou toute réflexion qui pourrait alimenter cette conversation.
Commentaire de l'artiste
Auparavant, je créais de l’art animée par la passion de raconter une histoire précise, longue et complexe, sur des années : sur la période où Sheila était enfermée, ou celle où je travaillais à Woodlands, ou encore les débats longs et violents sur la pornographie. En 2009, je travaillais à une histoire d’art sur les cadavres et le positionnement politique de la guerre. Puis, ma jeune amie Tempest Grace Gale a été assassinée. Peu après, une autre amie, Catherine White Holman, est morte dans un écrasement d’avion. Ensuite, ma copine, Della, a subi une série de petits AVC et a fait une chute qui lui a fracturé le dos.
Soudainement, funérailles et examens médicaux étaient à l’ordre du jour. Mon horizon temporel se limitait au jour présent, puis au jour suivant et à celui d’après. Dans mon art, je ne pouvais plus raconter l’histoire de la guerre. Tout tournait plutôt autour de ce qui se trouvait devant moi : ce morceau de bois flottant (noyé comme Tempest); ces ailes (comme Catherine tombant du ciel); cette charnière brisée (comme la colonne vertébrale fracturée de Della).
Cette œuvre est faite d’un chevauchement d’éclats de sens : le handicap, le regard fixe de la « lesbienne féminine », les amis morts, le racisme, la pluie sans fin, en même temps; toutes ces choses agissent sur nous en même temps dans nos vies quotidiennes. Ces significations superposées se reflètent dans les expressions qui couvrent les bords des panneaux, qui ne définissent pas une seule pièce ou un groupement, mais lancent des questions, font naître d’autres interprétations de la série dans son ensemble.
Galerie
« flicker doll », de l’exposition Identités façonnées, par Persimmon Blackbridge
Photo : Della McCreary
Il s’agit de la prise de vue rapprochée d’une sculpture, une poupée en bois sculpté montée sur un mur blanc. La poupée est faite de diverses matières. La tête se compose de bois brun et sa taille est légèrement réduite par rapport au reste du corps, toute proportion gardée. Elle est lisse sans visage ni traits. Le torse et le bas du corps sont faits de bois brun-rougeâtre au grain irrégulier qui a été sculpté afin que les cuisses soient épaisses, que les hanches soient larges et asymétriques et que les seins soient de forme différente. Un nombril a été gravé dans le bois. Sur l’épaule gauche, le bois fait place à une courte aile d’oiseau noire dotée de plumes aux reflets rouges. Des fils noirs descendent en cascade de l’épaule droite pour former le bras droit. Les jambes de bois se terminent aux genoux, la moitié inférieure étant occupée par des os en pointe.
« lacewood doll », de l’exposition Identités façonnées, par Persimmon Blackbridge
Photo : Della McCreary
Il s’agit de la prise de vue rapprochée d’une sculpture montée sur fond bleu. Elle se compose de trois parties qui, ensemble, forment une silhouette humaine aux proportions variées. La tête, les épaules et la hanche gauche sont faites de bois brun massif, sculpté pour qu’il soit lisse et ne présente aucun trait. Le bras gauche est un long morceau de plastique translucide. L’intérieur de cette partie est découpé sur deux lignes droites, formant un rectangle partiel qui encadre les deux autres parties du corps. Le torse est sculpté dans du bois brun pâle au grain riche, où le détail des seins, du nombril, de la région pubienne et des genoux est subtil. Le pied gauche est une minuscule poupée de plastique noire, et le pied droit a quatre orteils. Le bras droit est celui d’une poupée de plastique noire. Il est fixé au bord rectiligne sous l’épaule droite. La main droite repose sur le bois de la hanche droite.
« liminal barbie 2 », de l’exposition Identités façonnées, par Persimmon Blackbridge
Photo : Della McCreary
Il s’agit de la prise de vue rapprochée d’une sculpture représentant une silhouette humaine, montée sur un mur blanc et suspendue pour qu’elle semble flotter dans les airs. Elle est faite de bois et d’une poupée Barbie blanche. La tête de la poupée demeure intacte, mais ses yeux sont arrachés et ses cheveux blonds sont tressés. Ses bras, de différente longueur, sont faits de bois avec des mains de plastique et ils sont tendus au-dessus de sa tête. Celle-ci est inclinée pour que son regard soit dirigé vers ses mains. La poupée Barbie se termine juste au-dessus du buste. En dessous, elle est munie d’un morceau incurvé de tôle rouillée, découpé pour avoir l’air d’une cage thoracique. La moitié inférieure du corps, fixée à une tige, est faite d’un morceau de bois massif sculpté, ne présentant aucun trait, sauf un nombril. Les hanches sont mises en évidence et proportionnellement plus larges que le reste de la poupée, et les cuisses sont espacées. Les jambes de bois se terminent aux genoux, et la partie inférieure est faite de bâtonnets en bois foncé. Ceux-ci convergent en un point, comme chez une ballerine faisant une pirouette.
« relay doll », de l’exposition Identités façonnées, par Persimmon Blackbridge
Photo : Della McCreary
Il s’agit de la prise de vue rapprochée d’une sculpture suspendue sur un mur blanc pour qu’elle ait l’air de flotter. Celle-ci est faite de diverses matières : du bois sculpté, des parties d’une Barbie et ce qui semble une pièce interne d’appareil électronique. Elle forme la silhouette d’une personne dépourvue de bras. La tête et les épaules sont faites d’un morceau de bois sculpté brun-rougeâtre et ne présentent aucun trait. Sous les épaules se trouve un petit morceau carré en plastique avec du métal et des fils métalliques entrecroisés qui forment le torse. Il est fixé à la moitié inférieure du corps par plusieurs tiges courtes. Cette moitié est faite surtout d’un morceau de bois brun-rougeâtre massif, également lisse et sans traits, à l’exception d’un nombril. Le ventre est étroit et s’élargit pour former des hanches aux lignes courbes et des cuisses. La jambe droite se termine au genou par une pointe aiguisée. La gauche se prolonge jusqu’au genou, où le bois massif se termine. Elle est fixée à la jambe d’une poupée Barbie blanche.
Le public interagit avec « soft touch », une œuvre tactile de l’exposition Identités façonnées, par Persimmon Blackbridge
Photo : Steve Kean
Il s’agit de la photographie d’une personne qui touche une œuvre d’art montée sur un mur blanc. La personne se trouve du côté gauche et seul le côté droit de son corps est visible. Elle sourit légèrement et est photographiée de la taille vers le haut. Elle porte un blouson de cuir noir et un sac à main gris en bandoulière. Elle a des cheveux bruns qui lui tombent sur les épaules et elle porte des lunettes à monture noire. Elle tend le bras droit et touche à l’œuvre, qui se trouve du côté droit. Celle-ci est une sculpture représentant une silhouette humaine en bois sur une planche en bois. Le visage est dépourvu de traits. La moitié supérieure du corps est divisée en deux depuis la moitié inférieure, à la taille. Les deux moitiés sont faites d’un bois différent. Les bras sont faits d’une autre matière que le reste du haut du corps. Et la personne tient la jambe gauche de la silhouette.
À propos de l’artiste
Depuis 40 ans, Persimmon Blackbridge travaille comme sculpteure, auteure, commissaire et artiste de performance. Elle a aussi été éditrice d’œuvres de fiction, femme de ménage et très mauvaise serveuse. Son art, qui lui a valu le Lambda Literary Award, le Ferro-Grumley Fiction Prize, le VanCity Book Prize, le VIVA Award for Visual Arts et le Distinguished Alumni Award de l’Emily Carr Institute of Art and Design, a été présentée un peu partout au Canada et aux États-Unis ainsi qu’en Australie, en Europe et à Hong Kong. Elle vit sur l’île Hornby, en Colombie-Britannique.
À propos de Tangled
Tangled Art + Disability redéfinit audacieusement la façon dont le monde vit l'art et ceux qui le créent. Organisme à but non lucratif voué à l'art et aux personnes handicapées, il se consacre à établir des liens entre les artistes professionnels et émergents, la communauté artistique et un public diversifié. Son mandat est d'appuyer les artistes sourds, handicapés, et ceux vivant avec une maladie mentale de cultiver leur pratique artistique au Canada et d'améliorer l'accès aux arts pour les artistes et le public. Par ce travail, Tangled vise à créer une nouvelle norme d'excellence dans le domaine des arts en donnant la priorité à l'inclusivité au moyen de pratiques accessibles en matière de conservation, de programmation et de création artistique.
